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Comment réaliser des pistes provisoires ?

Publié le : 21 avril 2020
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D’un point de vue opérationnel, comment déployer un réseau vélo temporaire, où agir en priorité afin de faciliter l’après-confinement ?

Nous passons en revue les solutions possibles, les opportunités et les points de vigilance ainsi que toutes les questions à se poser.

L’importance de la communication

La priorité de ces réseaux vélos temporaires devra être d’attirer de nouveaux usagers, habitués de la voiture ou des transports en commun. Les itinéraires conçus devront donc être particulièrement visibles de ces usagers : sur les axes de transit les plus connus des automobilistes, notamment les axes configurés en 2X2 ou 2X3 voies en supprimant une voie de circulation, dans un sens ou dans les deux sens. Les itinéraires devront également être lisibles pour les usagers des transports en commun, en reprenant le tracé schématique des lignes fortes du réseau de transports de la ville ou en reliant les arrêts de métro pour les villes équipées. Les aménagements temporaires sont également l’occasion de résorber une partie des discontinuités du plan vélo actuel en complétant les maillons manquants.

La communication sur ce réseau temporaire pourra être faite par une campagne d’affichage sur les panneaux 4/3 d’information urbaine, sur le mobilier publicitaire peu mobilisé en période de confinement ou par des bandeaux sur les écrans dynamiques d’information voyageurs dans les transports en commun. Une communication temporaire sur les itinéraires et destinations accessibles par ce réseau temporaire pourra être expérimentée par du marquage au sol directionnel (attention, non-règlementaire mais expérimenté par certaines collectivités).

Pour les néophytes et ou les anciens usagers des TC, les guider avec une signalisation des itinéraires, pourquoi pas calquée sur ceux du métro ou des transports collectifs, afin de coller aux itinéraires des déplacements pendulaires. En créant un réseau vélo alternatif aux transports en commun sur le modèle des “itinéraires bis” des Autoroutes/RN pendant les chassés-croisés.

Le projet Vélopolitain, calqué sur le réseau de métro proposé par les associations vélo parisiennes

 

Opportunités et points de vigilance

Les aménagements temporaires peuvent être un outil de suppression des « points durs » qui persistent sur les réseaux cyclables et nécessitent souvent plusieurs années de planification pour permettre l’insertion d’une passerelle, d’un pont-cadre, etc. Les franchissements de voies ferrées, autoroutes, voies d’eaux sont souvent des ouvrages d’arts contraints. Un passage en sens unique peut permettre d’utiliser le deuxième sens pour la création d’une piste cyclable.

Les aménagements temporaires pourront également permettre d’adapter le réseau cyclable existant à la situation de distanciation sociale, nécessitant de nouveaux standards de largeurs et capacités pour limiter la promiscuité. Les pistes cyclables bidirectionnelles actuelles (largeur 2m ou 2m50) pourront être rendues unidirectionnelles et doublées sur chaussée ou élargies à 3 voire 4m lorsque c’est possible.

La problématique spécifique du stockage en intersection devra également être travaillée, via une réorganisation spatiale du carrefour ou une réorganisation temporelle (en agissant sur le plan de feux), afin de limiter les risques d’exposition au virus en attendant le feu vert, lorsque plusieurs cyclistes doivent patienter. La suppression des voies de tourne-à-droite dédiées constitue une opportunité de dégager de l’espace, elle a d’ailleurs été mise en œuvre à Berlin dans les aménagements temporaires créés.

Des cyclistes patientent au feu à Strasbourg, l’espace de stockage ne permet pas la distanciation sociale entre usagers

Enfin, la proximité entre les cyclistes et les piétons devra également être considérée, en reportant sur chaussée les aménagements existants sur trottoir, afin de dégager suffisamment de largeur pour les piétons. Une alternative aux voies vertes les plus empruntées (mixité piétons vélos) pourra également être proposée sur chaussée.

Comment soigner les détails de la conception ?

Le succès d’un aménagement, même temporaire, repose sur le soin apporté aux détails de conception et l’aménageur devra se poser les bonnes questions pour parvenir à un aménagement satisfaisant :

  • Comment insérer un aménagement temporaire dans un plan de feux existant en cas de carrefour à feux?
  • Quelle est la possibilité de mettre en place une phase vélo spécifique ou d’utiliser une phase existante?
  • Quelle possibilité de désactiver les feux pour permettre l’insertion de l’aménagement ?
  • Comment accède-t-on aux arrêts de transports en commun si l’aménagement cyclable passe devant ?
  • Quelles sont les ressources techniques dont dispose la collectivité dans ses centres techniques ou rapidement mobilisables par des entreprises avec lesquelles des marchés de travaux sont en cours ?
  • Quelles sont les possibilités de raccordement avec le réseau cyclable existant, notamment lors des transitions de la chaussée à une piste séparée, ou entre un aménagement unidirectionnel et un aménagement bidirectionnel ?
  • Quels sont les mouvements tournants principaux et comment les accommoder avec un aménagement cyclable bidirectionnel ou unidirectionnel ?
  • Les usagers, en grande partie des néophytes, sont-ils suffisamment rassurés par l’aménagement cyclable proposé, notamment sur la qualité de la séparation offerte avec le trafic motorisé ? En fonction du niveau de trafic ou des vitesses, des délimitateurs béton (type chantier) pourront être préférés à des marquages ou des balises.
  • Quel est le revêtement d’origine de la chaussée reconvertie temporairement ? Notamment s’il s’agissait de stationnement (revêtement glissant ? détérioré ? présence de bordures ?).

Quelles sont les pistes pour y arriver ?

Les options possibles doivent être considérées : Quelles sont les possibilités de supprimer des voies de circulation ? des voies de stockage en carrefour ? des places de stationnement sur chaussée ? Si l’espace n’est pas immédiatement disponible, un travail sur le plan de circulation peut-il permettre de supprimer un sens de circulation pour le réattribuer aux mobilités actives ? Les rues scolaires, dispositifs permettant d’interdire la circulation automobile sur les voies à l’abord d’une école peuvent également constituer un levier pour respecter les mesures de distanciation sociale lors de l’accompagnement des enfants à l’école par les parents.

Le portage politique peut-être délicat dans la période que nous vivons, avec des moyens logistiques concentrés sur la gestion de crise et des choix forts à réaliser, même pour des aménagements temporaires, qui plus est avec une échéance électorale repoussée, pour l’instant, à Juin. Mais les mobilités actives s’imposent naturellement pour surmonter la période de déconfinement, la demande pour les trajets en voiture et à vélo vont augmenter fortement.

Sur le plan juridique, le CEREMA le rappelle dans sa fiche : « Il n’existe aucune opposition juridique à une telle initiative. Il s’agit d’un changement d’exploitation de la voirie exigeant la prise d’un arrêté de circulation par l’autorité investie du pouvoir de police, au même titre que les autres mesures de police ».

Un aménagement temporaire devra évidemment comporter un dispositif d’évaluation, afin de déterminer son intérêt, sa fréquentation, le comportement des cyclistes aux intersections et la possibilité effective de respecter la distanciation sociale avec l’aménagement proposé.

La priorité reste de créer l’aménagement et il pourra être difficile de mettre en œuvre des solutions techniques telles que des boucles de comptages routiers temporaires, mais d’autres solutions restent possibles : observation active des carrefours, collecte de données photo/vidéo. L’aménagement temporaire peut être facilement supprimé s’il n’est pas efficace ou conforté durablement si le dispositif est satisfaisant.

Quelles solutions techniques déployer ?

Il existe plusieurs types de solutions légères ou lourdes :

  • Des solutions « légères » temporaires avec des mobiliers légers (balises types K 5x, J 1x…), faciles à mettre en œuvre, peu onéreuses à l’achat et à la pose, adaptées à des contextes routiers peu dangereux (sur zone 50, 1 file par sens…) sur lesquels un aménagement cyclable peut être implanté. Les collectivités auront pour ce faire besoin d’un allégement des contraintes juridiques de déclarations de travaux, permissions de voirie, etc.
  • Des solutions « lourdes » temporaires avec des dispositifs techniques comme des bordures béton sont plus onéreuses et peu compatibles avec du temporaire court (marquages) mais mieux adaptées pour des contextes routiers denses (2×2-3 voies, secteurs à vitesses > 50 km/h) ou la séparation physique vélo / véhicule motorisé doit être hermétique.
  • Des solutions « alternatives » temporaires avec des dispositifs utilisant des mobiliers existants détournés de leur fonction première : mobiliers à reconversion rapide en aménagement cyclable définitif (séparateurs longitudinaux type SMV pour voies mobiles, marquages, connections faciles au réseau cycliste existant, etc.) ou des dispositifs pour une réouverture rapide à la circulation motorisée originelle (balises, signalisation directionnelle-police, etc.).
Plots et balises : mobiliers de type K utilisés en signalisation temporaire, mobiliers d’indication (type J 1x) avec dérogation d’utilisation * cône de chantier lesté
Bordures plastique : mobiliers type séparateur de voie de type K 16 lestable, balise lestable ou spitée au sol
Bordures béton : mobiliers type séparateur GBA – DBA

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