Aujourd’hui, le sujet du vélo émerge dans les discours politiques, dans la culture des techniciens de voirie et dans des discussions de comptoir. Cela n’a pas toujours été le cas. Ou du moins, l’histoire du vélo a été mouvementée et pleine de rebonds. C’est cette histoire que nous allons tenter de vous raconter.
A l’origine, le vélo est une « draisienne ». Il n’a pas de pédales, pas de chaine et pas de dérailleur mais dispose de deux roues. Il se meut avec le balancier des jambes sur le sol. Cette invention date de 1817.
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Bicyclette#/media/Fichier:Bicycle_evolution-fr.svg
Fin XIX – Début XX : Émergence d’une pratique du vélo encore limitée à la classe supérieure
C’est dans les années 1870 que la pratique du vélo se développe : d’abord auprès d’un public aisé et avide de curiosités, puis auprès de la petite bourgeoisie (classes nouvelles, enseignants, professions libérales, bourgeoisie modeste, commerçants, fonctionnaires).
A cette époque, deux associations font la promotion du vélo avec des angles différents :
- L’Union Vélocipédique de France (ancêtre de la Fédération Française de Cyclisme) qui organise des compétitions cyclistes
- Le Touring Club de France qui développe la pratique cyclotouriste (et utilitaire mais dans une moindre mesure) dans un premier temps puis le tourisme sous toutes ses formes par la suite (randonnée, automobilisme, camping, montagne, équitation, etc.).
Figure 1 : Numéro de la Revue mensuelle du Touring Club de France
Source : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k64951046?rk=21459;2
Figure 2 : Le Chalet du Cycle, huile sur toile de Jean Béraud, 1897
Source : http://www.slate.fr/story/104509/velo-outil-emancipation-femmes
Depuis l’ordonnance du préfet de police Dubois n° 22 du 16 brumaire an IX (7 novembre 1800), intitulée « Ordonnance concernant le travestissement des femmes », celles-ci ne pouvaient porter légalement le pantalon à Paris que sur ordonnance médicale.
En 1892 et 1909 deux circulaires préfectorales auraient autorisé les femmes à porter le pantalon sous certaines conditions : « Si la femme tient par la main un guidon de bicyclette ou les rênes d’un cheval ». Mais les traces de ces circulaires sont introuvables : il s’agirait d’une légende urbaine. Quoi qu’il en soit la Bicyclette devient un emblème de la modernité et de l’émancipation des femmes !!
Entre deux guerres et 1936 : Développement d’une pratique populaire
La période de l’entre-deux guerres voit se développer une pratique du vélo étendue à l’ensemble de la société. On pratique ainsi le vélo dans le monde ouvrier (pour aller à l’usine, notamment) ou encore pour les loisirs (avec les premiers congés payés en 1936). Celle-ci se développe avec la même frénésie partout en France, y compris dans les territoires ruraux.
Figure 3 : Jacques Tati, Le Facteur
Source : https://www.pinterest.es/pin/249316529356535005/?autologin=true
Petit à petit elle prend des formes de plus en plus diverses et intègre les déplacements du quotidiens (utilitaires) et des usages professionnels.
Figure 4 : Les congés payés à vélo à l’été 1936
Source : http://www.leparisien.fr/archives/l-annee-des-premiers-conges-payes-11-07-2016-5957747.php
Figure 5 : Sortie d’usine entre deux guerres
Source : https://www.sudouest.fr/2011/04/01/la-memoire-ouvriere-de-l-entreprise-messier-359553-4321.php
Entre 1930 et 1940, les statistiques de l’époque font état qu’environ 1/3 des déplacements étaient réalisés à vélo. La pratique devient donc massive.
Après-guerre
A l’après-guerre, le développement de la voiture et du deux-roues motorisé rend la pratique du vélo de plus en plus dangereuse. Le vélo est délaissé. Les publicités d’époque du cyclomoteur moquent le vélo. On peut y lire des slogans comme « Le solex, une bicyclette qui roule toute seule » ou encore « La mobylette, un vélo avec un petit vent arrière permanent ! ».
Figure 6 : La bicyclette qui roule toute seule
Source : http://solex-attitude.over-blog.com/article-affiche-pour-le-1400-120219997.html
Une résurgence de l’usage du vélo est néanmoins notée au début des années 1970. Des associations de cyclisme urbain viennent défendre le vélo comme un mode de déplacement. En 1974, le Mouvement de Défense de la Bicyclette suivi en 1989 du Club des Villes et Territoires Cyclables sont créés. Ces mouvements associatifs ont permis de faire entendre la voix des cyclistes dans un environnement urbain devenu dévolu aux modes de déplacements motorisés. D’abord inaudibles, ils ont progressivement gagné la sympathie des parisiens qui pour la plupart n’étaient pas propriétaires de voiture.
Après 1980 : Quelques indices positifs
A partir des années 1980, on voit se développer une pratique loisir du vélo. Les ventes de VTT explosent dans les années 1990 mais la pratique utilitaire ne décolle pas pour autant. Cependant, ici et là, en ville quelques aménagements de modération de la vitesse ainsi que quelques aménagements maladroits voient le jour.
Figure 7 : Couloir de courtoisie, début années 1980
Source : http://www.sortirdeparisavelo.fr/blog/2015/09/paris-en-1974-peur-sur-la-ville/
Figure 8 : Aménagement réalisé dans les années 1995 – 2000, Porte de la Chapelle (Paris)
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/V%C3%A9lo_%C3%A0_Paris#/media/Fichier:Echangeur_periph-Pte-Chapelle_01.jpg
XXIème siècle : La machine est relancée
A partir des années 2000, la pratique utilitaire du vélo augmente fortement dans les grandes villes et grandes Métropoles françaises. L’émergence des cyclistes en ville est toujours plus visible et ne tarde pas à générer d’inévitables tensions entre les usagers de la rue.
Les efforts des pouvoirs publics pour pacifier la circulation automobile payent. Du côté des usagers, l’argument santé fait mouche. La culture vélo se reconstruit progressivement mais n’atteint pas encore la frénésie des années 1930.
Figure 9 : La culture vélo se reconstruit progressivement
Aujourd’hui, le vélo a le vent en poupe. La population émet de fortes attentes quant à l’amélioration du cadre de vie, de la mobilité du quotidien et notamment de la mobilité à vélo. Les élus sont sensibles à ses aspirations “nouvelles”. Les dernières mises à jour du code de la route ainsi que les subventions (aux aménagements cyclables, à la planification et à la formation) toujours plus présentes confèrent un cadre règlementaire et financier propice au développement du vélo, en ville, en périurbain et à la campagne.